Du début à la fin, Mme Merkel n’a cessé d’imposer une ligne impliquant la prise en charge des migrants par l’ensemble des pays européens, quand bien même ces derniers auraient exprimé leurs réticences voire leur refus.
Cette politique irresponsable et dangereuse est bien entendu tout autant irréaliste : confrontée à l’hostilité très vive des opinions publiques européennes (y compris la sienne), submergée par un flot de migrants pas toujours éligibles au droit d’asile et dont l’intégration économique et sociale est bien plus difficile qu’allégué par les sans-frontiéristes, l’Allemagne a ainsi dû faire machine arrière en catastrophe. Pour obtenir l’aide indispensable de la Turquie dans cette crise migratoire sans précédent depuis 1945, elle a fini par négocier toute seule avec Ankara un fragile accord assorti de concessions exorbitantes.
En visite encore il y a quelques jours dans ce pays, flanquée d’une délégation d’eurocrates, Mme Merkel a eu une nouvelle fois l’occasion de mesurer l’inextricabilité du piège dans lequel elle a elle-même foncé tête baissée, entraînant à sa suite 500 millions d’Européens qui ne lui en avaient nullement confié le mandat.
Refusant visiblement de se plier aux fameuses 72 conditions qu’elle est censée respecter pour pouvoir bénéficier de la libre circulation dans l’espace Schengen début juillet prochain, la Turquie n’y est pas allée par quatre chemins : elle a purement et simplement lancé un ultimatum au terme duquel, si satisfaction ne lui est pas donnée, elle cessera toute politique de réadmission des migrants entrés en Europe depuis son sol. A bon entendeur pour les pays européens et la Commission, qui se réuniront mercredi prochain pour un bilan d’étape sur cette question cruciale…
Nul doute qu’ils seront obligés de céder, prisonniers qu’ils sont de ce piège infernal, le leur. Nul doute non plus qu’ils cèderont sur toutes les autres exigences d’Ankara : le paiement de la bagatelle de six milliards d’euros et surtout la relance des négociations d’adhésion à l’UE, en vue cette fois d’une conclusion favorable sans qu'aucune incertitude soit plus avant permise. Une perspective catastrophique bien sûr, dont aucun observateur ni responsable public sensé n’a manqué de souligner les multiples périls. Moi-même depuis 2004, je n’ai cessé d’alerter les Français !
Du début à la fin, Ankara aura été cyniquement à la manœuvre : car, comme on pouvait aisément l’imaginer, ce sont les autorités turques qui contrôlent les réseaux de passeurs vers la Grèce, ou qui en tout cas ont le pouvoir d’en interrompre à tout moment l'activité. Preuve en a été donnée avec le tarissement brutal du flux de migrants sur l’île de Leros, où j’avais pu constater l’ampleur de la crise il y a un an mais où un de nos amis confirme aujourd’hui que l’île a repris une vie normale…
J’en retire deux enseignements : tout d’abord, à défaut d’étanchéifier les frontières, il est possible de maîtriser les mouvements migratoires d’ampleur à condition de s’en donner les moyens. Ensuite, si l’attitude de la Turquie est incontestablement malveillante, il est incontestable que nous, Européens et notamment Français, lui avons remis des bâtons pour nous faire battre ! A cet égard, il aurait fallu dès le début empêcher les migrants de prendre pied sur les côtes grecques, ce à quoi on s’emploie dorénavant avec tant de retard…
Il faut donc poursuivre le double combat de la maîtrise de nos frontières et de la lutte contre l’entrée de la Turquie en Europe. Un combat plus actuel et crucial que jamais, que j’ai relancé cette semaine en mettant en ligne une pétition que je vous invite à signer et faire signer massivement !
A tous les niveaux et à toutes les étapes, le gouvernement et le président français auront été les grands absents, pire les complices par défaut, de cette catastrophe migratoire et de ce fiasco géopolitique annoncé. Quelle preuve plus flagrante et plus incontestable que notre pays, phagocyté dans cette Europe de facture et à direction allemande, s’est mis dans une spirale de déclin ? Décidément, 2017 sera l’occasion d’inverser le cours des choses !